Un autre exalté à l’Université d’Ottawa
Fournier
Pour la plupart des Québécois, l’exalté de l’Université d’Ottawa, c’est Jacques Frémont.
Le recteur de l’Université d’Ottawa est devenu autant par ses déclarations que par ses silences le chef de file du wokisme outaouais. Mais il y a un autre exalté dans cette université qui était jadis la gloire des Oblats, c’est Michael Geist. Très peu de Québécois le connaissent, sauf les trois qui ont eu l’honneur (ou la malchance) de devenir ministres du Patrimoine dans le gouvernement de Justin Trudeau.
Michael Geist, docteur en droit, occupe la chaire de recherche de l’Internet et du commerce électronique de l’Université d’Ottawa. Mais son réel intérêt, c’est un blog quasi quotidien dans lequel il défend avec l’acharnement d’un chien enragé la liberté et l’indépendance de l’Internet. Si ce dessein est très louable, il peut aussi constituer un formidable obstacle à toute action contre les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft).
Plutôt domestiqué sous le règne du Premier ministre Stephen Harper, Geist n’a pas desserré les crocs depuis l’élection du gouvernement libéral en 2015. Sauf lorsque Mélanie Joly est allée faire les yeux doux à Reed Hastings pour revenir de Los Gatos avec une promesse de Netflix d’investir 500 millions $US en cinq ans. La somme a été largement dépassée, mais presque exclusivement pour produire chez nous des films et des séries à meilleur compte qu’aux États-Unis.
Une rare unanimité
Geist avait profité de cette promesse pour justifier qu’on laisse les GAFAM en paix pour qu’en retour ils nous inondent de beaux billets verts. Depuis, Geist s’est prononcé contre toute tentative de les obliger à laisser en taxes, en impôts ou en redevance une partie des sommes faramineuses qu’ils siphonnent dans nos poches. Les consultations du CRTC, le comité de Janet Yale et, par leur pression, les syndicats d’artistes, d’auteurs et compositeurs ont réclamé à l’unanimité que les GAFAM fassent leur part pour la production de contenu canadien et sa promotion. Geist a donc dû se résigner à relâcher les mâchoires. Mais à peine...
Ses blogs, ses nombreuses interventions en compagnie de son disciple préféré, Peter Menzies, un ancien vice-président du CRTC, ainsi qu’une certaine complicité avec l’ex-président Konrad Finkelstein, ont galvanisé et enflammé les conservateurs. Ils n’ont pas cessé de mettre des bâtons dans les roues des projets de loi visant à ponctionner les GAFAM. Tout cela au nom d’une liberté qui ressemble de plus en plus à la LIBARTÉ proclamée par les convois de camionneurs, c’est-à-dire à une espèce de «free for all».
Une lutte de dix ans
D’abord présenté par Steven Guilbeault et mort au feuilleton pour cause d’élection, le projet de loi remanié sur la diffusion continue en ligne (C-11) fut enfin voté aux Communes en 3e lecture en juin dernier. Le comité sénatorial des transports et des communications a ensuite passé des semaines à entendre des témoins et à lui chercher des poux. En tout, 73 amendements ont été présentés au comité qui en a retenu 26. Le comité les présentera au Sénat en 3e lecture en février, puis projet de loi et amendements seront retournés aux Communes où les députés décideront de ce qu’ils retiennent.
Michael Geist peut crier victoire. En bonne partie à cause de lui et de tous les «suiveux» qui le vénèrent et prennent ses propos comme parole d’évangile, il aura fallu dix ans avant que les GAFAM ne versent leurs premiers dollars pour la production de contenu canadien, ce qui aura lieu quelque part en 2025 ou 2026!