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Mulroney, le dernier réconciliateur, salué par Couillard

PHOTO D'ARCHIVES, DIDIER DEBUSSCHÈRE

Brian Mulroney est le dernier à avoir essayé de réintégrer le Québec au sein de la famille constitutionnelle canadienne, une opération pour laquelle «on doit lui être reconnaissant comme Québécois», selon l’ancien premier ministre Philippe Couillard.

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«Je garderai toujours en mémoire cette tentative, que je trouve encore aujourd’hui courageuse et sincère, de réintégrer le Québec dans l’axe constitutionnel à travers l’accord du lac Meech, ce qui pour Mulroney représentait un risque politique considérable», affirme-t-il en entrevue.

Une opération condamnée d’avance

«Déçu» par la tournure des événements à l’époque, Philippe Couillard, devenu premier ministre libéral des décennies plus tard, a voulu réparer les pots cassés.

En 2017, son gouvernement lance une campagne intitulée «Québécois, notre façon d’être Canadiens» visant à rapprocher le Québec avec le reste du pays pour, à terme, préparer le terrain à des discussions constitutionnelles.

La réponse d’Ottawa au document de 197 pages a été glaciale. «Vous connaissez mon opinion sur la Constitution. On n’ouvre pas la Constitution», avait sèchement lancé Justin Trudeau, en chemin pour une réunion, sans s’arrêter. Fin de la discussion.

Philippe Couillard ne s’en formalisait pas à l’époque. Avec le recul, il dit «regretter» la manière dont les choses se sont déroulées.

  • Écoutez l'entrevue avec Gérard Deltell, député de Louis-Saint-Laurent, qui a connu M. Mulroney via QUB :

«Ça a à peine fait l’objet d’une remarque», dit-il. «Je ne suis même pas sûr que [le document] a été lu en détail à l’époque, et ça m’a déçu parce qu’il y avait beaucoup de travail et de réflexion qui était entrée dans la préparation de ce document-là. J’aurais aimé au moins qu’il y ait une réponse.»

Surtout que l’objectif de sa démarche n’était pas de lancer un appel à rouvrir la Constitution, mais de «lancer un dialogue» avec les provinces et les nations autochtones, les municipalités, les universités dans le Rest of Canada.

Le tabou de la Constitution

Une approche à la Mulroney est impensable aujourd’hui. À Ottawa, on évite le sujet comme la peste. Mais Philippe Couillard a bon espoir que son document pourra servir un jour à d’autres politiciens téméraires, comme le fut à l’époque le charismatique chef des progressistes-conservateurs.

«Un jour ou l’autre, quelqu’un devra s’y attarder, parce que ce n’est pas vrai que c’est un sujet qui doit être interdit. Je ne connais pas d’autres pays démocratiques où on ne peut pas discuter de cette question. Les gens parlent beaucoup moins de ça, mais il y a là un enjeu tout à fait profond dans la vision du pays.»

Un beau risque trop risqué

Le professeur de droit et penseur du fédéralisme Benoît Pelletier n’écarte pas la possibilité qu’une figure à la Mulroney puisse un jour émerger pour mettre un terme au «tabou» constitutionnel qui règne à Ottawa.

Or, ça ne se bousculera pas au portillon, car Brian Mulroney a fini par en payer le prix politique, analyse-t-il. «C’est un dossier dont plusieurs se souviennent comme étant porteur d’échec.»

Élu avec la plus grande majorité de l’histoire du Canada en 1984, sa fin de règne, marquée notamment par les échecs constitutionnels, a été amère.

«Il en a payé un prix longtemps, peut-être même encore de nos jours au Canada “dit” anglais, parce que plusieurs lui en ont voulu d’avoir justement cherché à accommoder le Québec. Il y a eu un prix et il y a probablement encore un prix à payer pour M. Mulroney», explique Benoît Pelletier.

«En fait, ceux qui ont cherché comme Mulroney à rouvrir le dossier constitutionnel ont été davantage critiqués que ceux qui ont saboté le dossier constitutionnel», poursuit le professeur de l’Université d’Ottawa.

À ce titre, il est juste de décrire Mulroney comme le dernier réconciliateur, juge-t-il.

«Même si ses tentatives ont échoué, il reste au moins qu’il a eu le courage et en même temps la sagesse de mettre de l’avant une vision du fédéralisme qui détonait par rapport à celle de Pierre Elliott Trudeau.»

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